Et Vogue leur image…

Janvier 1981. Deux portraits de Diana sont publiés dans le Vogue britannique. La plus jeune des filles du comte Spencer a été conseillée dans le choix de ses vêtements par Anna Harvey, qui dirige le service mode du magazine, et pose dans une robe en dentelle et une blouse couleur crème. À quelques jours de l’annonce de ses fiançailles avec le prince Charles, un public conquis découvre ses yeux interrogateurs, son visage de vingt ans, et ce je-ne-sais-quoi de frappant qui, déjà, ressort de son attitude. Le XXe siècle finissant vient de trouver sa muse.

Si Sarah et Jane, les sœurs de Diana, ont, les premières, pris contact avec la direction du mensuel pour lui confier l’image de leur cadette, c’est parce qu’elles savent le lien particulier, privilégié, unique, que celui-ci entretient avec les Windsor depuis 1916, année où il a été créé. Grâce à une recette éprouvée – des photographes de renom, une bonne dose de romantisme et des auteurs bien en cour –, Vogue est le seul magazine au monde capable d’influer durablement sur la perception que les Britanniques ont des membres de leur famille régnante.

« De vrais gens »

En novembre 1939, le mensuel publie une série de portraits de l’épouse de George VI (la mère d’Elizabeth II) réalisée par Cecil Beaton, un photographe dont le travail est, à l’époque, considéré comme « révolutionnaire ». Le numéro installe dans les esprits une représentation à la fois « éblouissante et profondément humaine » de la monarchie dont les effets seront encore perceptibles bien après la fin de la Seconde Guerre mondiale. Tout au long du conflit, les images prises par Beaton du couple régnant et de ses deux filles, les princesses Elizabeth et Margaret, confortent l’opinion dans sa vision d’une dynastie inébranlable dont le quotidien ne serait, dans le fond, pas si différent du sien. En 1963, Queen Mum écrira à Beaton pour le remercier de les avoir montrés, elle et les siens, comme « de vrais gens ».

Margaret est alors devenue pour Vogue une figure essentielle, centrale. Ses portraits romantiques d’après-guerre ont laissé la place aux instantanés plus incisifs, plus mordants, signés par son époux, le photographe lord Snowdon. Entièrement imprégnés de sa personnalité incandescente et de son indépendance d’esprit, ceux-ci vont faire d’elle, tout au long des sixties, l’emblème d’une certaine forme d’émancipation féminine.

« Des photos qui sont celles d’une femme, et non d’une célébrité »

Car être perçue comme étant profondément de son temps demeure bien l’objectif ultime d’une apparition dans Vogue. Dans les années 1970, le mensuel dresse le portrait d’une princesse Anne « remarquablement » efficace dans l’exercice de son métier de princesse et très engagée sur le terrain humanitaire – méconnaissable dans des robes à corolle, la fille d’Elizabeth II et du prince Philip est alors le premier membre de la famille royale à accepter de figurer sur sa couverture. Pour le 100e anniversaire du magazine, au début de l’année 2016, Kate apparaît quant à elle devant l’objectif de Josh Olins en jean et chemise à carreaux, au milieu des champs. « Des photos qui sont celles d’une femme, dira le magazine, et non d’une célébrité**. »

** Les citations qui figurent dans ce texte sont extraites pour la plupart du livre The Crown in Vogue, par Robin Muir et Josephine Ross, éd. Thunder Bay Press, 2022.

Diana photographiée par Patrick Demarchelier pour ses 33 ans, en juillet 1994, et Catherine, duchesse de Cambridge, devant l’objectif de Josh Olins, dans le numéro du mois de juin 2016. PHOTO 2 : La princesse Anne en couverture du magazine, en septembre 1971 et (à gauche) en novembre 1973, à l’occasion de ses fiançailles avec le capitaine Mark Phillips, son premier époux.

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